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Gilles Deleuze

"Tout philosophe s'enfuit quand il entend la phrase: on va discuter un peu."
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11 septembre 2008 4 11 /09 /septembre /2008 08:23



Essayons d’abord, avec des mots assez simples, de décrire ce qu’est la vie et la mort, avant de répondre à cette question.

La vie est le déploiement dans l’espace et le temps de « quelque chose » que l’on peut appeler « étant ». Ce déploiement est caractérisé par le souci, la préoccupation  et l’angoisse.

Déployé dans le temps et l’espace, se trouvant « en-compagnie » des autres, il est « à-dessein », il est  un « devant-là » qui ouvre son avenir.
A la différence des choses, il doit « porter son être », il ne peut se permettre de se « laisser à être »,  porter son être c’est l’essence de son être.

Bien sûr, il peut ne pas le faire, il peut se débiner, se cacher, dévaler dans le « on », c’est-à-dire dans le « on-dit », dans l’anonymat de la masse, trouver refuge dans ce qui est caché, uniforme et immobile et (faussement) rassurant. C’est, du reste, sa grande tentation.

Ce faisant, il mène une existence inauthentique, soit une existence qui se masque la mort.

La mort – qui n’a rien à voir avec le décès – est « là » pour l’homme,  à la différence de l’animal qui ne la pressent pas. La mort, pour l’homme, est toujours perçue par lui comme conscience de la possibilité de sa propre impossibilité , elle est avant tout  « pensée de la mort » ; l’homme est un « être-à-la-mort » (« Sein-zum-Tode » M.Heidegger. « Etre et Temps », Gallimard) .
Mourir est propre à l’homme, car, seul, il entretient un « rapport pensif à la permanente  possibilité de l’impossibilité ».

La mort, comme sortie du monde, est le néant, soit le non-étant, l’étant ayant sa source dans l’être, elle est un retour à l’être. On ne meurt pas « une fois », cela s’appelle le décès, on meurt « sans cesse » dès que l’on se situe hors de l’étant pour dévaler dans le « on ». (cfr. St Paul : « tous les jours je suis à la mort. »)

A partir de ces quelques considérations, on comprendra que pour déployer l’étant qui nous est propre, il nous faut être dans la capacité de le faire ; se tenir dans la « possibilité » objective de l’articuler dans son dessein.
Cette capacité présente des caractères objectifs et subjectifs.

Subjectivement, on peut considérer que le déploiement de l’étant peut se faire dans tel ou tel cadre donné avec tout ce que cette considération a de personnel.

Et on peut fonder ce déploiement sur des éléments purement subjectifs comme une croyance philosophique ou religieuse, un conception du monde, des gens ou d’une histoire propre qui y invitent.

On peut aussi, sur base des mêmes considérations, conclure à la non-faisabilité du déploiement de l’étant que l’on est,  à son invalidation dans son cours.

Et dans cette dernière hypothèse, envisager de retourner au non-étant, « compléter » le déploiement de l’étant et faire retour au non-étant.

Cette complétude de l’étant qui nous est propre, elle nous est intimement personnelle, aussi personelle et intime que peut l’être non pas la mort, mais « ma » mort.

C’est donc le suicide. L’acte par lequel on décide volontairement de ne plus « porter » l’être, de mettre ainsi fin à l’ « ex-stance ».

La mort étant ce qui nous est le plus intime, cette décision ne peut être partagée par autrui.
Elle ne peut, comme toute préoccupation être écartée, car la « …fuite devant la mort (est ) une façon de détourner la vue de la fin de l’être-au-monde. » (M. Heidegger. op.cité, p.492).

Il appartient donc à l’étant d’être en face-à-face avec la mort et de se préoccuper de sa complétude.

Que faire lorsque des conditions liées à l’état physique ou physiologique de l’étant l’empêchent de mettre fin à son déploiement ? Il s’agit, dans ce cas, de l’appel à l’intervention d’un tiers qui agit dans le sens demandé par celui qui a pris la décision de compléter son étant.

Dans une perspective purement objective, là où il n’y va de rien d’autre sinon fournir une assistance passive ou active à l’acte qui mettra fin au déploiement de l’étant, cette assistance supplée à l’impossibilité de l’étant de mettre sa décision en exécution, elle est, donc, de l’ordre de l’aide, de la compassion, de la com-préhension (prendre avec).
Essentiellement, il n’y a pas de différence entre cet acte et celui qui consiste à faire traverser la rue à un aveugle.

 

La justification de cette assistance a son fondement dans :

 1)  la  caracatéristique de l’étant qui fait qu’il n’est étant que dans la mesure où il assume son face-à-face avec « sa » mort ;

2) la solidarité qui doit caractériser les relations entre étants qui sont aussi des « être-avec-l’autre », et dans le fait que l’on ne peut être reconnu, dans son  désir de déploiement comme dans celui de la complétude, que par l’autre.
Assister à  la mort d’autrui, c’est le reconnaître comme être-à-la-mort.

 

Cette assistance soulève, cependant, une foule d’interrogation qui ont pour objet la capacité de l’étant à formuler clairement sa demande, à en  peser la signification et, pour celui qui l’assiste, sa liberté et donc sa responsabilité dans la mise en action de l’aide.

Il va de soi que le législateur doit agir en la matière. Avec toutes les interrogations que cela suscite, tant il est vrai que ce dernier ne préside pas toujours à des dispositions simples et lisibles.

Des exemples à l’étranger sont là qui peuvent l’inspirer.

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