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Penser l'actualité, le quotidien et l'histoire sans a-priori et avec un esprit critique.

Christianisme et violence

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Jésus chasse les marchands du Temple

 

Le christianisme est aussi révolutionnaire que l’islam et même plus violent dans son énoncé.
Difficile à croire ?
Imaginez qu’une secte religieuse se développe dans nos banlieues. Qu’elle adore comme dieu un inconnu guillotiné voici cinquante ans. Qu’elle déclare qu’il est plus facile à un chameau de passer par le chas d’une aiguille que pour un riche aller au paradis. Qu’elle maudisse les riches et les prêtres et les théologiens. Qu’elle voue les classe dirigeantes et leurs obligés bourgeois et nantis, aux gémonies. Qu’elle fasse passer les pauvres, les immigrés, les déshérites avant tout le monde et proclame haut et fort que les derniers seront les premiers.
Qu’elle instaure la chasteté comme règle et le mariage comme remède contre la concupiscence.
Vous diriez quoi ?
Ce que Tacite disait de cette « secte juive » : abominable !
Prenons cette injonction incroyable du Nouveau Testament : « Qui ne hait (miseo en grec) pas et son père et sa mère et ses frères et ses sœurs… celui-là n’est pas digne d’être mon disciple. »
Autre passage : « Je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive ».
Que penser de ça ?
Jésus vient pour « accomplir » la Loi mosaïque. Il le dira plusieurs fois. Ce qui importe, ce n’est pas la Loi, ce qui importe c’est le salut. Le salut passe-t-il par l’observance stricte de la Loi ? Non ! C’est ce qui est dans le cœur qui importe. La quintessence de la Loi est de ne plus être Loi, de se dissoudre dans le cœur de l’adepte. Croire ce n’est pas observer la Loi. Le Centurion romain n’était pas juif, la samaritaine l’était si peu. La loi est le rideau, le christianisme la scène que dévoile le rideau quand les trois coups retentissent.
Pour aimer, il faut savoir haïr. Aimer-haïr sont comme le Ying et la Yang. L’Un et l’autre. L’autre et l’un. Haïr son père et sa mère, c’est haïr son habit social, son apparence, son identité imposée, il faut mourir à cette identité, dénier l’autre pour renaître à l’Autre, rejeter le réel pour le Réel. Et pour tuer son identité héritée, il faut le glaive et non pas la Loi, et user du glaive ce n’est pas la paix, c’est la guerre. User du glaive pour tuer en nous tout ce qui est facile, reconnaissable, rassurant. Jésus ne nous appelle pas à l’assurance ni à la stabilité, il nous demande de nous dépouiller de la peau du « vieil homme » et ce dépouillement est violent et douloureux. Comme un enfantement qui fait du croyant cet enfant promis pour le Royaume.
La théologie chrétienne post évangélique ira encore beaucoup plus loin dans cette exploration de la violence. En déifiant Jésus elle opère une narration psychologique dé-constructive. Au sacrifice avorté d’Isaac, fils d’Abraham, elle substitue le sacrifice du fils de Dieu lequel inaugure un nouveau temps traumatique. Le traumatisme initial, celui de la faute originelle, est effacé dans le sang de la Croix qui devient nouvelle référence et nouveau témoignage.  Le christianisme n’est pas – à la différence de religions pré-chrétiennes – une sagesse, c’est une croyance en Christ, individu mortel et temporel. La temporalité du Christ-homme s’identifie à l’éternité du Christ-Dieu. Temps et Éternité se rencontrent en sa personne. Et c’est là, précisément que l’on peut dire que le christianisme est une religion d’amour. En amour l’objet fini et temporel vaut plus que tout et la conversion est un événement temporel qui change l’éternité. La conversion authentique permet à chacun de se re-créer soi-même, c’est-à-dire de répéter cet acte et donc de changer les effets de l’éternité elle-même.
Changer le temps, c’est abolir ce qu’il y avait avant le « nouveau temps » et cette abolition se doit d’être totale : « Il n’y a plus de Grecs, de Romains, d’hommes ou de femmes… » comme le dira Paul. La perspective est éclairée par un temps-éternité nouveau, inconciliable pour les fantômes du temps-avant. Il n’y a plus de fantômes, il n’y a plus qu’une Présence éternelle qui
contracte ce qui reste comme temps-éternité pour n’en faire qu’un Présent tant il est vrai que l’éternité n’est que par rapport au temps et vice-versa.
Christ n’est pas mort « in illo tempore », il ne cesse de mourir et ressusciter tout comme le chrétien ne cesse de témoigner.
C’est dans cette distorsion du temps que réside la violence du christianisme qui ainsi annihile la notion antique de l’Absolu et du relatif. Dans le christianisme l’Absolu devient relatif pour que le relatif devienne Absolu. Dès lors il y a implosion de l’un comme de l’autre.
Fragile Absolu !  

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V
La question de l’intensité de la violence s’apprécie individuellement.<br /> En ce qui me concerne, rencontrer la formule « craignez-le » plusieurs fois par page est déjà très violent, et je remercie les auteurs de me mettre en garde contre ce dieu, un de plus, qui est<br /> décidément bien à craindre.<br /> Ce que je trouve également violent, mais que je n’ai pas vu dans la bible, c’est la mise en garde contre les « mauvais », les « pires » : ceux qui dans leur immense orgueil se livreraient à des<br /> interprétations de ce qui est écrit.<br /> Mécréant type, j’ai donc refermé celui de ces livres du Dieu unique, mais multiforme dans ses mœurs apparemment, qui m’enfermait dans la non interprétation, puisqu’en tant qu’agnostique, le seul<br /> intérêt que je trouve aux textes anciens, comme la mythologie grecque ou la bible, c’est précisément ce rêve dont j’espère qu’il est révélateur de quelques vérités symboliques, dont la traduction<br /> peut se révéler formatrice pour l’esprit humain, indépendamment de l’existence ou non de cet être suprême hypothétique dont je ma passe bien, et qui ne nous a laissé aucune preuve de son existence.<br /> Ce n’est pas Kant, grand croyant s’il en est, qui me dira le contraire, évidemment. Merci au passage à ce monsieur qui démolit par la raison l’argument ontologique de Descartes et d’autres<br /> convaincus.<br /> La richesse de ces textes est dans le symbolisme qu’ils véhiculent, non dans la lettre.<br /> Dès lors, haïr ses parents devient une toute autre chose que les mots qui composent la formule, et bien que le message biblique ne m’apparaisse essentiellement que comme une resucée du message de<br /> la mythologie grecque, un tantinet perverti à mon goût, je crois qu’il répond assez bien aux questions existentielles que les hommes sont naturellement enclins à se poser, pourvu qu’ils ne<br /> renoncent pas à leur propre nature en adhérent à la volonté d’un grand inexistant qui leur dicterait les lois de l’irresponsabilité aveugle, de l’indiscernement qui ne mènera certainement pas<br /> l’humanité à un stade de grandeur que seule la réflexion et la raison lui promettent.<br /> Mais, à réfléchir, il faudrait enfin décider de commencer .
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